danses
jeudi 20 avril 2006
il y a quelques jours, j'ai voyagé avec l'infirmier de nijinski, dans un train transpercant la suisse - montreux oberland bernois - , il se souvenait surtout de romola nijinski, la femme de nijinski, il a soigné nijinski à genève pendant quelques semaines, au moment où nijinski, accompagné de sa femme, sillonnait l'europe des hôpitaux psychiatriques, il m'a demandé si j'étais un peu comme diaghilev, il nous a décrit le paysage entre montreux et zweisimmen, il prend toutes les semaines ce train à montreux à 14h55, je reprendrai ce train au début de juin pour le retrouver,il est collectionneur de peintures et il est abonné à la gazette de l'hôtel drouot, pendant le trajet - qu'il effectue donc au moins hebdomadairement - ses ami.e.s sortent dans leur jardin au moment où le train passe pour le saluer, il a un abonnement général, ce qui, en suisse, donne l'accès illimité à tous les moyens de transports collectifs nationaux (bus, trains, bateaux), il est veuf,
mercredi 19 avril 2006
flambé les visages et nous avons dansé, raidi nos côtés, comprimé nos rachis, et nous sommes restés inaudibles,
je ne le supporte qu'asséché, jugulé, étranglé, rasé, je n'aime que ses cadences régulières, stables, sans arts ni variations ni inventivités, je ne le supporte que muet et rapide, sans intention, sans arrogance à cracher, sans sentiment à déverser, je ne le supporte que lorsque ses mains sont dures, froides et blasées, je n'aime pas sa curiosité et sa bienveillance interminable
je ne le supporte qu'asséché, jugulé, étranglé, rasé, je n'aime que ses cadences régulières, stables, sans arts ni variations ni inventivités, je ne le supporte que muet et rapide, sans intention, sans arrogance à cracher, sans sentiment à déverser, je ne le supporte que lorsque ses mains sont dures, froides et blasées, je n'aime pas sa curiosité et sa bienveillance interminable
lundi 17 avril 2006
ce sont ici les visages électrifiés, foudroyés, montagneux, plissés, empourprés ; la tristesse planante et, déjà, les divas chiliennes qui surgissent aux terrasses, les ami.e.s collègues roussi.e.s par le printemps et déjà enlisé.e.s ; les prises, les marquages, les délais, les crocs, les rencontres faîtières,
les étreintes immobiles, figées, glacées, rocailleuses rêvées loin de paris se réchauffent déjà très vite, grésillent, s'allument, se compliquent, se desserrent ; la raideur épuisée et contrainte s'adoucit déjà, mollit civilement au contact de grands corps motorisés ; et fument, ondulent les essences brûlées, déjà ; s'éloignent déjà les perspectives minérales et stériles,
je rêvai pourtant de revenir ici transformé, mué, en canard conquérant, colvert inévitable, glissant sur les fleuves, concurrencant en grâce, je rêvai de former quelque colonie formidable avec des ami.e.s cygnes et poules et foulques, de devenir inaccessible, élégant, aquatique,
je n'en ai gardé qu'une colerette lunaire, argentée, japonaise et inestimable
ici, ce sont déjà les grands sabres, d'immenses tôles tronçonnées, des nuages métalliques et irrespirables, je fais des lectures et des projets sanguinaires et j'imagine des futurs enragés,
ce sont déjà les laitages solidifiés, pourris, transformés, méconnaissables, émancipés et intouchables, ce sont déjà les membres entiers - plus seulement les doigts, mais aussi les hanches, les biceps, les mollets - envahis, décorés de verrues blanches et gonflées ; ce sont ici les ondes soniques et radiales, jaillissant de sources invisibles et fédératrices,
les étreintes immobiles, figées, glacées, rocailleuses rêvées loin de paris se réchauffent déjà très vite, grésillent, s'allument, se compliquent, se desserrent ; la raideur épuisée et contrainte s'adoucit déjà, mollit civilement au contact de grands corps motorisés ; et fument, ondulent les essences brûlées, déjà ; s'éloignent déjà les perspectives minérales et stériles,
je rêvai pourtant de revenir ici transformé, mué, en canard conquérant, colvert inévitable, glissant sur les fleuves, concurrencant en grâce, je rêvai de former quelque colonie formidable avec des ami.e.s cygnes et poules et foulques, de devenir inaccessible, élégant, aquatique,
je n'en ai gardé qu'une colerette lunaire, argentée, japonaise et inestimable
ici, ce sont déjà les grands sabres, d'immenses tôles tronçonnées, des nuages métalliques et irrespirables, je fais des lectures et des projets sanguinaires et j'imagine des futurs enragés,
ce sont déjà les laitages solidifiés, pourris, transformés, méconnaissables, émancipés et intouchables, ce sont déjà les membres entiers - plus seulement les doigts, mais aussi les hanches, les biceps, les mollets - envahis, décorés de verrues blanches et gonflées ; ce sont ici les ondes soniques et radiales, jaillissant de sources invisibles et fédératrices,
dimanche 2 avril 2006
La mare
Les sirops expectorants ternissent mes fièvres brûlantes et magnifiques, les médecins suisses offrent les médicaments aux étranger.e.s, j’aurais dû me méfier d’une si suspecte générosité ; en Suisse, on ne tue pas les fièvres par des antipyrétiques connus, minéraux, placides et francs : on me fait me gargariser d’étranges ‘fébrifuges’, je dois garder la potion trouble quelques moments en bouche, la faire bouillonner, flatter sa perfidie… et la fièvre se dessèche, toussote, agonise mollement, fuit littéralement, misérablement et sans guerre…
Mais je n’oublie pas les éclairs violacés des eaux lémaniques qui m’ont ébloui et échauffé, ses brumes dansant avec les cimes, ses nettetés littorales, et ses canards et ses cygnes, aux cous giratoires admirables.
Et mes ami.e.s des Pâquis citronnent ma convalescence, narguent ma gorge cadenassée de soies enflammées en se dépoitraillant glorieusement, aidé.e.s par l’heure d’été et le printemps.
Mais je n’oublie pas les éclairs violacés des eaux lémaniques qui m’ont ébloui et échauffé, ses brumes dansant avec les cimes, ses nettetés littorales, et ses canards et ses cygnes, aux cous giratoires admirables.
Et mes ami.e.s des Pâquis citronnent ma convalescence, narguent ma gorge cadenassée de soies enflammées en se dépoitraillant glorieusement, aidé.e.s par l’heure d’été et le printemps.
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